Des chars de l'armée syrienne pilonnaient lundi 1er août au soir un quartier de Hama, à quelques heures d'une réunion en urgence du Conseil de sécurité de l'ONU après une offensive massive qui a déjà fait 104 morts depuis dimanche dans cette ville rebelle du centre de la Syrie.
"Dix chars sont en train de bombarder d'une manière indiscriminée Dawar Bilal, un quartier résidentiel à la périphérie de Hama", a déclaré un militant sur place, joint par téléphone, alors que le bruit des obus résonnait derrière lui en ce premier jour de ramadan.
Selon Abdel Karim Rihaoui, chef de la Ligue syrienne des droits de l'Homme, des tirs nourris étaient entendus lundi soir dans tous les quartiers de Hama. "L'armée poursuit sa mission dans la ville de Hama, en enlevant les barricades dressées par les groupes de saboteurs aux principales entrées de la ville", a pour sa part annoncé l'agence officielle Sana, évoquant de "vastes affrontements" contre des groupes bien organisés, à l'armement sophistiqué.
L'armée et les forces de sécurité ont déjà tué 100 personnes dimanche et quatre autres lundi à Hama, ainsi que 39 personnes dans le reste du pays dimanche, selon un décompte réalisé à partir de bilans de plusieurs organisations de défense des droits de l'Homme.
Le président Bachar al-Assad a cependant félicité lundi son armée à l'occasion du 66e anniversaire de sa création. "Vous tous représentez l'orgueil et la fierté", a affirmé Bachar al-Assad selon l'agence officielle Sana, faisant fi des réactions internationales horrifiées après l'une des journées les plus sanglantes depuis le début du mouvement de protestation le 15 mars.
Terroristes
Nous pouvons "faire échouer ce nouvel épisode du complot bien ourdi, qui vise à morceler la Syrie, en prélude à la division de la région entière en petits Etats qui se battent entre eux", a martelé Bachar al-Assad, qui s'est aussi rendu lundi au chevet de soldats hospitalisés.
Depuis le début de la révolte, les autorités accusent des "groupes armés" et des "terroristes" de répandre le chaos dans le pays, en s'infiltrant parmi les manifestants. Située à 210 km au nord de Damas, la ville de Hama a été le théâtre d'immenses manifestations contre le pouvoir ces dernières semaines.
Le pouvoir, qui s'en était retiré, cherchait depuis à soumettre cette ville déjà symbole de la lutte contre le régime depuis la répression en 1982 d'une révolte des Frères musulmans, qui avait fait 20.000 morts.
Tirs nourris
Lundi, outre les morts à Hama, les forces de sécurité ont aussi tué deux personnes, dont un enfant de 13 ans, à al-Boukamal (est), selon le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane, joint par téléphone en Grande-Bretagne.
En outre, des habitants ont vu "plus de 80 chars et des équipements militaires" se diriger vers Deir Ezzor (est), où 19 personnes ont été tuées dimanche, faisant craindre "les préparatifs d'une vaste opération militaire", a-t-il ajouté.
Les chars sont entrés dans al-Houla, au nord-ouest de Homs (centre), où des tirs nourris ont été entendus et 15 personnes blessées, a expliqué Rami Abdel Rahmane. Ils ont aussi encerclé Zabadani, à 60 km au nord-ouest de Damas, où l'armée a dressé des barricades dans la ville, a déclaré M. Rihaoui.
Prendre une position claire
La répression n'a pas empêché les manifestations. Des milliers de personnes ont ainsi défilé dans les rues de Salamiyé, près de Hama, en soutien aux victimes des violences.
Depuis le début de la contestation, la répression a fait quelque 2.000 morts, dont plus de 1.600 civils, selon les associations de défense des droits de l'Homme.
A New York, le Conseil de sécurité de l'ONU tiendra lundi des consultations à huis clos sur la crise en Syrie, a indiqué un porte-parole de la présidence du Conseil, dont l'intervention avait été sollicitée par plusieurs puissances occidentales, en particulier par l'Union européenne.
"Il est temps pour le Conseil de sécurité de prendre une position claire sur la nécessité de mettre fin à la violence", a ainsi affirmé la chef de la diplomatie de l'UE, Catherine Ashton, après avoir annoncé un renforcement "imminent" des sanctions européennes contre Damas.
Renoncer aux provocations
Le président américain Barack Obama s'est dit "horrifié" par les événements de dimanche et le chef de la diplomatie britannique, William Hague, a demandé "davantage de pression internationale" sur la Syrie tout en rejetant la possibilité d'une action militaire sous l'égide des Nations unies. Amnesty International a appelé l'ONU a prendre immédiatement "des mesures fermes pour endiguer cette violente campagne de répression":
embargo sur les armes, gel des avoirs de M. Assad et d'autres responsables soupçonnés de crimes contre l'humanité, saisine de la Cour pénale internationale.
Parmi les pays plutôt proches de la Syrie, la Russie a appelé le gouvernement syrien et l'opposition "à renoncer aux provocations et à la répression", tandis que la Turquie a condamné les violences et appelé le régime à engager des réformes afin d'éviter une "internationalisation" de la crise.
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